Osé-je dire « mon père… »
Que le lourd rideau de fer
Vient s’abattre brusquement
Entre l’homme et son enfant
Voudrais-je me rapprocher
Je me verrais rejetée
Incapable de pleurer
Ce qui n’a pu exister
On m’a montré un portrait
Consolation dérisoire
On m’a dit que tu m’aimais
Je n’aspire qu’à le croire
Car j’ai oublié tes bras
Concepts abstraits que cela
Si ce n’est un chant du soir
Qui éclairait mes nuits noires
Ou bien l’ai-je imaginé
Ce canon qu’on a chanté
Un triste et lancinant air
Qui s’est inscrit dans mes chairs
T’ai-je vraiment embrassé
En haut de cet escalier
Gigantesque embarcadère
Qui t’emmenait vers l’enfer
Était-ce ce moment-là
Face à moi, je ne sais plus
Celui de l’ultime fois
Dont tu n’es pas revenu
Le temps volatilisé
Pendant de longues années
En me sortant des limbes
M’a amenée à ta tombe
Loin de ce sinistre somme
J’ai compris alors que l’homme
Enfermé dans ses mystères
Dans un large cadre en fer
M’avait transmis un lien
Pour que la vie continue
Par son sang devenu mien
Après celui qui n’est plus
En poursuivant ce chemin
Je ferai ma propre route
J’explorerai mon destin
M’affranchirai de mes doutes
Désormais devenue mère
Dans l’absence de mon père
Par-delà lui je reprends
Le rythme du temps présent
Par ce résilient exploit
Empreinte de son aura
Ainsi suis-je née deux fois
De celui qui n’est plus là